lundi 27 novembre 2017

Une journée ordinaire

   Chers lecteurs,

   Les jours se suivent et se ressemblent. La lumière est morne. L’ambiance, fadasse. 
   La faculté se dégrade. Le niveau baisse. 

   Rien ne sort de l'ordinaire, et je toise, une fois encore, le banal qui m’entoure.

   La traversée du couloir, ponctuée de salutations froides parmi des coassements grotesques. 
   La mollesse des étudiants, l’indolence de leurs pas, la trivialité de leur langage
   La réunion, le long des chauffages, des apprenants frileux, dont les petits doigts bouffis se pressent sur les appareils de communication.

   Un soupir accablé.

   Tiens, mais qui voilà ! La MCF insipide – toujours aussi fade, sans intérêt et sans saveur – tourne la tête et m'évite soigneusement. 
   Je croise bientôt le Professeur Tournesol, perdu et en retard, qui a oublié son café. Le MCF prétentieux le suit et se dandine, toujours très content de lui, souriant, sa pochette de cours sous le bras.

    Poignées de mains. Salutations barbantes. Aménités interminables. Oh, quelle purge ! 
    Décidément, la glossectomie se perd.

   Rien ne change. Tout dure et se patine. Froideur marmoréenne, démarche hiératique, je songe à cette spirale de déclin au cœur de laquelle notre société sombre. 
   Le temps est gris. Les copies des M1, d’une absolue platitude.

   Il suffisait pourtant que je croisasse, parmi la foule des bipèdes méprisables, ma MCF préférée, pour que se transformât ma vision de ce lundi matin. 
   Ma MCF préférée – le menton haut, le brushing parfait, la splendeur ineffable –, comme toujours resplendissante, annonçait, par sa présence céleste, une nouvelle semaine, subtilement garnie de plaisirs et d’espoirs.

   Allons donc rendre leurs notes à ces fameux M1. Après tout, ils ne sont pas si mauvais !


   Pr. Fourbe

vendredi 15 septembre 2017

Le chargé de TD obséquieux

   Bonjour à tous,

   Le monde universitaire est peuplé d’une myriade de sous-fifres – autrement dit de chargés de TD aux statuts divers –, la plupart d’une grande platitude. Aussi n’ai-je pour dessein que de vous présenter les plus remarquables (Cf. La chargée de TD mesquine).

   Le chargé de TD obséquieux est de ceux-là. 
   Affable, dévoué, témoignant d’une extrême considération envers l’enseignant-chercheur – a fortiori à mon égard, mais quoi de plus normal, me direz-vous –, le chargé de TD obséquieux paraît avoir compris les rouages du système. 
   Quelques principes de bases : la hiérarchie se respecte ; sans alliés, point de succès.

   Bien que je ne sois guère sensible aux flatteries, force est d’admettre que les marques de haute estime – que dire des prunelles s’illuminant sur notre passage ! – procurent toujours un certain plaisir (Cf. La reconnaissance). 
   A condition, bien sûr, que ces marques soient sincères… ou qu’elles en aient l’apparence.

   Peu importe pour le Maître de conférences prétentieux, ronronnant de plaisir à la simple évocation de ses titres, et que notre flatteur corrompt de ses complaisances. 
   Une belle fable à admirer en salle des professeurs, faussement placide, un café à la main, alors que l’Université se délite.


   Pr. Fourbe

lundi 28 août 2017

Les vacances de l'enseignant-chercheur


   Bonjour à tous,

   Une fois n’est pas coutume, Je profitais, il y a peu, sur quelque plage de notre belle France, d’un de ces instants de répit qui ne sont que trop rares. 
    L’occasion pour Moi de jeter les bases de ma prochaine publication – la période estivale étant synonyme de rédaction d’articles – jusqu’à ce que quelques attardés en claquettes-chaussettes fissent éruption sur le rivage et n’y semassent la pagaille avec leur musique, leurs rires bêtes et leurs maillots trop grands (#bolosses).


   Déranger ainsi un Professeur dans ses glorieuses réflexions, quelle insolence !

   Ne pouvant noyer tous ces fauteurs de trouble, Je pris mes cliques et mes claques, mes notes et mon transat et, jetant le tout dans le coffre de ma DS 21, renonçai finalement à la plage. 
   L’Excellence était à ce prix.

   Vous l’aurez compris, la période estivale est pour Moi celle de la production scientifique.

   Dans la mesure où l’oisiveté le condamne – avancement de carrière, gloire et renom, etc. –, un bon enseignant-chercheur n’est jamais en vacances. 
   Certains s’en portent très bien (Cf. Le grand PREX, Le Professeur Tournesol), tandis que d’autres attendent – en vain – la reconnaissance tant espérée (Cf. Le Maître de conférences triste). 
   D’autres collègues ont renoncé à la recherche (Cf. Le Maître de conférences fainéant) : un exemple que quelques-uns, ignorant encore la futilité de leurs papiers, eussent été inspirés de suivre depuis longtemps (Cf. La Maître de conférences insipide).


   Pr. Fourbe

lundi 8 mai 2017

Le jeune Agrégé

    Bonjour à tous,

    Le jeune Agrégé est jeune, charmant, et déjà Professeur.
   Je ne le porte pas dans mon cœur. Il y a peut-être, je l’admets, outre une grande rivalité, un peu de jalousie. 
   Explications.

   Alors que j’étais encore Maître de conférences, pas un jour ne s’est écoulé sans que je ne songeasse à devenir Professeur. Si je l’ai désiré depuis le premier jour, il m’aura fallu de longues années pour y parvenir.
 
   Le jeune Agrégé a mis quinze ans de moins que Moi. 
   Une ascension éclair, tout en fourberie, vers le plus haut grade universitaire.

   Je ne voulais pas seulement être Professeur, mais accéder au titre dans mon Université et sans passer par l’Agrégation – dispositif méprisable et archaïque à mon sens.
 
    Le jeune Agrégé, quant à lui, n’avait d’autre but que d’accéder au Professorat le plus vite possible.
   Ce pimpant collègue, sitôt docteur, se présenta donc au concours national de l’Agrégation – avec un grand A, celle de l’enseignement supérieur –, qu’il réussit brillamment. 
   Avec son directeur de thèse dans le jury, le contraire m’eût étonné.

   En d’autres termes, et en dépit des apparences, le jeune Agrégé et moi n’avions ni le même objectif, ni les mêmes contraintes associées.

   Nous avons cependant, semble-t-il, une cible commune : ma Maître de conférences préférée.

   Monsieur le jeune Professeur, la guerre est déclarée.



   Pr. Fourbe

vendredi 20 janvier 2017

Le langage des jeunes


   Bonjour à tous,

   Pas blindé, l’amphi, en ce vendredi matin. 
   Plantons le décor. 
   Les cagoles du fond, à s’enjailler sur la dernière pic de Kévin, qui fait son BG sur Insta / Snap ; devant, le délégué trop soin mais grosse poukave ; plus loin, une petite zouz causant avec son keum OKLM.

   Je leur adressai un regard noir afin qu’ils se tussent. IRL, nul besoin de clasher à renfort de punchlines pour se faire comprendre.

   Ah, c’est sûr, ils sont dég d’être venus à huit heures, les fêtards : après la cuite d’hier soir, d’aucuns sont encore dans le mal… 
   Les mêmes qui se présenteront à l’exam en free-style, à la one again, genre "on s’en balek", alors même qu’au fond, ils ont trop le seum d’être des boloss.

   Pas facile, alors, de savourer mon flow sur l’optimum paretien : sûr qu’ils préféreraient des conseils de tarba pour pécho easy

   Fallait-il donc que je m’exprimasse ainsi pour qu’ils s’éveillassent et se prissent d’intérêt pour mon cours ?
   
   LOL. Des barres, gros.


   Pr. Fourbe

Note : merci au chargé de TD héliotrope pour sa traduction du langage des jeunes !