samedi 19 septembre 2015

Le PRCE envieux


    Bonjour à tous,

    En dépit d’efforts destinés à ce que s’instaurât un climat de solidarité entre les maîtres exerçant au sein de mon Université – ne fût-ce que pour des raisons électorales –, il m’apparut très vite que persistaient en celle-ci, parfois même sans aucune façade afin de les dissimuler, les rivalités les plus acides. Outre ce flagrant manque de fourberie – cela est bien connu : dans bien des cas et des conversations, la grandeur de votre sourire sera proportionnelle au mépris éprouvé à l’égard de votre interlocuteur –, je constatai, peut-être plus distinctement encore, l’existence d’une profonde frustration en la personne du PRCE envieux.

    Loin de considérer son affectation dans le Supérieur comme une chance incroyable, laquelle est recherchée par nombre de ses confrères certifiés, le PRCE envieux l’admet tout juste comme la récompense – insuffisante – de ses efforts passés. En effet, si l’Université lui ouvre ses portes et lui permet, auprès des néophytes, de se faire mousser lorsqu’il explique, très fier, qu’il « enseigne à l’Université », celles-ci, une fois refermées derrière lui, laissent à l’enseignant un arrière-goût autrement plus amer. 
    Comment l’expliquer ? Voilà tout justement l’intérêt du paragraphe suivant.

    L’Université est un tout autre monde que le secondaire dans lequel le PRCE envieux professa durant de nombreuses années. D’une atmosphère de lycée où se rencontre chaque jour une immensité d'enseignants titulaires du CAPES parmi quelques agrégés minoritaires, il se retrouve à côtoyer PRAG, Maîtres de conférences et Professeurs autrement plus nombreux que lui. En outre, aux yeux des puristes, amateurs de la sempiternelle et inflexible grille des statuts, sa Maîtrise, modeste face à l’avalanche de thèses l’encerclant, au même titre que sa réussite au concours national du CAPES, le positionnent tout en bas de la hiérarchie enseignante*. 
    Devient alors maussade le PRCE envieux, dont le ressenti, au fil du temps, tend irrémédiablement vers les affres de la négativité. 

    Estimé à la hauteur d’un simple subalterne, il en vient à mépriser la classe des enseignants-chercheurs, au traitement infiniment supérieur, donnant deux fois moins d’heures que lui, et au melon si gros – régulièrement sustenté par quelques publications d’articles, conférences et autres colloques prétentieux – qu’il en rendrait modestes des égos tels qu’Alain Delon ou Ségolène Royal.

    A partir de ces quelques discours, comprenez-vous sans doute bien mieux la pensée de notre PRCE, et notamment son aversion, graduelle, tant à l’égard de ses homologues PRAG que pour les deux corps d’enseignants-chercheurs, laquelle approche ainsi de l’immodération. 
    Sans doute notre PRCE oublie-t-il que ce sont eux qui, un jour, lui ont ouvert les portes de l’Université. 

    Et non moins que, s’il aspirait véritablement à l’Excellence, il serait sans doute l’un des leurs.


    Pr. Fourbe

*Errent bien sûr, plus bas encore, les enseignants vacataires. Toutefois, je ne doutais pas que vous les estimassiez comme tels, ainsi ce bref rappel s'avérait-il suffisant.

mardi 8 septembre 2015

Le duel de fourbes


    Bonjour à tous,

    Il est des guerres inutiles dont le degré de gâchis ne peut être décrit.
   Le duel de fourbes relève de celles-ci, au point même, à mes yeux, d’en constituer un cas d’école, tant le coût cruel et le déroulement tragique étaient prévisibles. 
    Je n’exagérerais aucunement en vous confiant qu’il s’agit du conflit le plus pitoyable que je connaisse : en effet, le duel de fourbes est un jeu à somme négative.

    Tout d’abord, quelques définitions. 
    On parle de jeu à somme nulle lorsque, au terme d’une partie, l’addition des gains de chaque joueur se trouve égale à zéro. En d’autres termes, le profit de l’un est la perte de l’autre.
    Selon certaines perspectives, nous pouvons considérer l’existence comme un jeu à somme nulle – nous en reparlerons prochainement. 
   Au contraire, dans un jeu à somme positive, les deux joueurs sont gagnants. Par déduction, vous comprendrez que le phénomène est inverse dans le cadre d’un jeu à somme négative : il n’y a que des perdants.

     Pourquoi jouer, alors ? me direz-vous.
    La réponse est somme toute assez simple : bien souvent, c’est la peur qui nous force à agir. Nous percevons l’autre comme un rival, ainsi nous faut-il l’éliminer. Point. 
    D’une manière plus générale, lorsque les sentiments s’en mêlent, les comportements humains deviennent très vite de l’ordre du n’importe quoi.

     Appliqué au duel de fourbes, le principe n’est pas autre. 
    Si nous l’évoquons en image, le conflit est aussi destructeur que lorsque, au départ d’une épreuve olympique, les deux favoris – voire même les deux seuls ayant capacité à réussir – trouvent intelligent de se tirer dans les pattes. En résulte qu’aucun d’entre eux ne remporte l’or et que, plus stupide encore, ils n’auront sans doute pas de médaille du tout. 
    Comme si deux personnalités politiques rivales, à l’aube d’une élection, tendues à l’idée d’un coup bas, étaient amenées à le provoquer elles-mêmes. Ainsi, en présumant que chacun possède sur l’autre des informations compromettantes, la peur que l’un les révèle amène l’autre à le faire. Il est alors prévisible – pour ne pas dire patent – que le premier dénoncé fasse son possible pour briser le second. 
    Au final, les deux sont discrédités et aucun ne remporte l’élection.

     Mais il y a pire. En effet, il arrive que le conflit éclate alors même que les deux fourbes n’avaient pas le même objectif. 
    J’en vois déjà écarquiller des yeux ronds comme des soucoupes. Comment est-ce possible ?
    Eh bien par la simple présomption que l’un, ayant remarqué l’esprit vif, calculateur, de l’autre, se persuade que celui-ci dissimule stratégiquement son objectif, lequel serait potentiellement le même que lui. Il y aurait ainsi rivalité cachée. Vous le pressentez sans doute, le déroulement est ainsi analogue au précédent et, par une rivalité féroce, les deux en viendront à se détruire mutuellement.

    Que les finalités réelles soient similaires ne change subséquemment pas grand-chose. 
    Vous constatez alors ô combien il est dommageable pour les protagonistes d’entrer en conflit, alors qu’une alliance leur aurait permis d’accéder au sommet. 
    Dès lors, une conclusion s'impose d'elle-même : entre fourbes, la coopération est la seule issue favorable.


    Pr. Fourbe